Et s’il était à refaire
Je referais ce chemin
Une voix monte des fers
Et parle des lendemainsOn dit que dans sa cellule
Deux hommes cette nuit-là
Lui murmuraient « Capitule
De cette vie es-tu lasTu peux vivre tu peux vivre
Tu peux vivre comme nous
Dis le mot qui te délivre
Et tu peux vivre à genoux »Et s’il était à refaire
Je referais ce chemin
La voix qui monte des fers
Parle pour les lendemainsRien qu’un mot la porte cède
S’ouvre et tu sors Rien qu’un mot
Le bourreau se dépossède
Sésame Finis tes mauxRien qu’un mot rien qu’un mensonge
Pour transformer ton destin
Songe songe songe songe
A la douceur des matinsEt si c’était à refaire
Je referais ce chemin
La voix qui monte des fers
Parle aux hommes de demainJ’ai tout dit ce qu’on peut dire
L’exemple du Roi Henri
Un cheval pour mon empire
Une messe pour ParisRien à faire Alors qu’ils partent
Sur lui retombe son sang
C’était son unique carte
Périsse cet innocentEt si c’était à refaire
Referait-il ce chemin
La voix qui monte des fers
Dit je le ferai demainJe meurs et France demeure
Mon amour et mon refus
O mes amis si je meurs
Vous saurez pour quoi ce futIls sont venus pour le prendre
Ils parlent en allemand
L’un traduit Veux-tu te rendre
Il répète calmementEt si c’était à refaire
Je referais ce chemin
Sous vos coups chargés de fers
Il chantait lui sous les balles
Des mots sanglant est levé
D’une seconde rafale
Il a fallu l’acheverUne autre chanson française
A ses lèvres est montée
Finissant la Marseillaise
Pour toute l’humanitéLouis Aragon, Ballade de celui qui chanta dans les supplices, 1943